( let's get lost in dazzling haze. )
feat @Ariel Chapman

Aujourd’hui, elle s’était rendue au travail en râlant. Elle n’avait clairement pas envie d’y aller. Les vendredi soir étaient toujours terribles. Entre les familles et les couples, il n'était jamais facile de survivre à un vendredi soir. Les enfants avaient tendance à être surexcité à l’idée d’aller voir un film et de pouvoir se goinfrer de pop-corn. Les couples lui donnaient envie de les pousser dans les escaliers. Ce n’était pas très sympa, et elle n’en était certainement pas fière. Mais la petite pointe de jalousie qu’elle ressentait à chaque fois qu’elle les voyait si heureux et amourachés, lui donnait instinctivement des envies de meurtre. Quand est-ce que cela allait être à son tour ? Mais, ce soir, lorsqu’elle avait vu le vélo d’Ariel dans le cagibi, la joie avait supplanté toutes les autres émotions. Le destin semblait lui envoyer un doux message : ça va aller. Cela faisait des semaines qu’ils n’avaient pas effectué un shift ensemble et elle se rendit compte à quel point cela lui avait manqué. Comme tout était plus doux lorsqu’il était là. Leur patron avait la fâcheuse tendance à faire en sorte que leurs horaires ne concordent jamais. Comme s’il détestait les voir s’amuser en travaillant. Être ensemble ne les avait jamais rendus feignants ou désagréables, ils étaient au contraire bien plus enjoués et souriants. Néanmoins, sa joie fut rapidement remplacée par une légère angoisse. La dernière fois qu’ils s’étaient vu : elle l’avait embrassé. Le souvenir était encore vif dans son esprit et elle n’avait eu de cesse de ressentir une sorte de palpitation à chaque fois que son esprit s’était égaré. Bien sûr, elle avait également honte. Elle n’en revenait pas d’avoir à ce point agi sur un coup de tête. Ils n’en avaient absolument pas reparler. D’ailleurs, ils n’avaient pas parlé de grand chose d’autre. Elle aurait pu mettre cela sur le compte des cours, du travail, et de bien d’autre chose encore. Mais jusque-là, tous ces trucs n’avaient jamais été un obstacle pour passer du temps ensemble. Le moindre minute de liberté était accordée à l’autre avec plaisir. Avait-elle tout gâcher ? Elle espérait que non. NON, elle SAVAIT que non. Ce n’était pas un simple baiser pour rigoler - un baiser plein d’orgueil blessé - qui allait changer quoi que ce soit. Ils étaient amis depuis plus de dix ans : ils avaient bien trop à perdre pour que tout change. Alors, il était évident que c’était un peu gênant ; mais ils allaient en rire. Comme toujours. Il allait lui lancer une petite pique, elle rirait et tout irait bien, dans le meilleur des mondes.

C’est avec cette idée en tête qu’elle déboula derrière le comptoir alors qu’il était en train d’ajouter des pots à pop-corn dans une pile. “Mais que vois-je ? Vous ici !” dit-elle, faussement étonnée. Elle s’approcha pour lui faire une accolade. Elle ne se risqua pas à lui faire un vrai câlin ou à l’embrasser sur la joue. Ce fut maladroit et bien plus gênant qu’elle ne l’aurait imaginé, mais elle entreprit de l’aider à remplir les piles - comme si cela était une activité nécessitant impérativement deux personnes - et pu donc éviter son regard sur elle. Ils n’avaient qu’un petit quart d’heure à passer rien qu’à deux avant que le cinéma n’ouvre et que les premiers clients ne débarquent. Ils étaient quand même encore capable de rendre cela possible ? “Quelque chose à signaler ? Une machine en panne ? Une rupture catastrophique sur les m&m’s?” s’enquit-elle, histoire de parler de banalité. Elle souhaitait être en terrain neutre. Il serait plus simple de faire comme si de rien n’était, comme si elle ne s’était pas rejoué le moment dans sa tête une centaine de fois, s’ils parlaient du travail. Elle voulut ensuite passer au stock de gobelets, mais elle se rendit compte que la personne qui avait ramené les rames de gobelet, les avait également placé au-dessus du frigo, les rendant inatteignables pour elle. Elle se racla doucement la gorge : “Excusez-moi jeune homme, pourriez-vous aider une damoiselle en détresse ?” Elle accompagna sa demande d’une petite révérence pour le faire rire avant de tendre le bras en l’air en se hissant sur la pointe des pieds pour lui montrer ce qu'elle cherchait à attraper et pourquoi elle avait besoin de lui. Ses doigts se refermèrent sur du vide mais elle ne céda pas à l’impulsion de sauter pour les attraper.

let's get lost in dazzling haze + Stevie & Ariel

Les dernières semaines avaient été hautes en couleurs pour Ariel, qui avait multiplié les déboires, allant de sa rupture avec Chloe à l’incendie dans son immeuble, au chauffard qui avait bien failli leur ôter la vie à lui et Skylar, sans parler de son ordinateur qui avait été échangé avec une inconnue… La liste était longue, mais ce qui l’avait tourmenté le plus restait néanmoins le baiser que Stevie lui avait volé avant de partir, le laissant sujet à une multitude d’interrogations qu’il n’avait pas osé aborder avec elle depuis. D’ordinaire, il ne se serait probablement pas posé autant de questions, mais l’embrasser avant de s’en aller n’était pas quelque chose dont ils avaient l’habitude, même dans leurs moments de folie, même quand parfois, ils se laissaient entraîner par des élans de gaminerie, leur amitié avait toujours eu une place si importante qu’aucun d’eux n’avait jamais osé la mettre en danger. Et si ça le tourmentait autant, est-ce que ça voulait dire quelque chose ? Est-ce qu’elle était amoureuse de lui ? Après tout ce temps ? Les doutes l’avaient envahi, et il avait beau tout faire pour les chasser, une part de lui n’arrivait pas à chasser ce souvenir de son esprit. En pédalant pour rejoindre le cinéma, il passa près du Riverwalk, jetant machinalement un oeil à leur café préféré, cherchant sans vraiment chercher une tête brune qu’il n’aperçut pas. Ariel n’avait pas revu Stevie depuis ce baiser, et si elle lui manquait, évidemment, il avait été happé par tous les rebondissements du quotidien en plus d’une appréhension à la revoir. C’était complètement idiot, et il s’en voulait de ne pas avoir fait ce pas vers elle, parce qu’il avait l’impression que plus le temps passait, plus il serait délicat de passer outre le froid que leur dernière rencontre avait causé.

Arrivé au Pointe 14, il déposa son vélo dans le placard, et récupéra sa tenue dans le vestiaire. Quelques instants plus tard, il était derrière le comptoir, assurant la mise en place du point de vente avant qu’ils n’ouvrent au public. Concentré sur le réassort des pots à popcorn, il n’avait pas entendu Stevie arriver, et sursauta lorsqu’elle rompit le silence et sa concentration. Machinalement, il lui rendit son accolade. Elle avait l’air naturelle, faisant complètement fi de ce qui avait pu se passer entre eux, et quelque part, Ariel n’en fut que soulagé. Il n’aurait pas à avoir de discussion à ce sujet, et il avait été bien ridicule d’imaginer quoique ce soit. C’était juste un baiser, ça ne voulait rien dire, ils n’étaient plus des gamins qui chutaient à vélo dans la rivière… Ou peut-être que si, mais plus les mêmes, au moins. Elle faisait comme si de rien était, concentrant la conversation sur le boulot, et le brun se racla la gorge. « Non, rien à signaler. » Pourquoi il y aurait-il du changement ? Ce n’était pas comme si la machine à popcorn avait embrassé le lave-vaisselle… Conscient d’avoir l’air froid, et évitant soigneusement de la regarder, Ariel s’acharnait sur ce foutu pot qui se refusait à rentrer dans le rang et à prendre sa place au dessus des autres. Ce n’était pas son genre de s’énerver, ni même de perdre patience, mais faire semblait n’avait jamais été son fort non plus, bien au contraire. On pouvait reprocher à Ariel bien des choses, sa maladresse, souvent, mais elle était toujours étroitement lié à sa sincérité et à l’authenticité auxquelles il était attaché.

Lorsque Stevie l’appela à la rescousse, il posa le pot qu’il tenait à la main et leva les yeux au ciel, s’avançant vers elle en trainant les pieds. Les mains sur les hanches, il la regarda essayer d’attraper les gobelets, trop hauts pour que ses petits doigts ne parviennent à s’emparer du sachet qui les contenait. Elle avait l’air d’une sauterelle, ou peut-être d’un éléphant dans un magasin de porcelaine, mais ses tentatives n’avaient rien de gracieux, et c’était toujours ce qui l’avait fait mourir de rire chez elle. Encore une fois, un sourire avait illuminé ce visage jusque là trop fermé pour qu’il ne soit le sien, et sans attendre, le Chapman s’approcha. Il tendit le bras pour refermer ses doigts sur le trésor tant convoité, et en se tournant légèrement pour tendre le paquet à sa meilleure amie, il réalisa à quel point ils étaient proches. Quelques centimètres entre leurs deux visages qui effacèrent le sourire d’Ariel, le regard perdu dans les grands yeux bleus de la Fischer, sur ses lèvres… Quelques secondes. Ca avait duré quelques secondes, avant qu’il ne recule. « Tiens. » Il lui enfonça les gobelets contre la poitrine, et se tourna vers le comptoir, alors que les premiers clients avançaient déjà dans le hall. Ariel se posta derrière la caisse, mais le groupe de jeunes hommes semblaient espérer être servis par une toute autre personne. Le brun avait beau patienter, eux n’avaient d’yeux que pour Stevie, agitée à faire des piles avec les gobelets en carton. « Elle est dispo la demoiselle pour notre commande ? » Demanda l’un d’eux. Il était grand, plutôt beau garçon, et probablement sportif si on en croyait sa veste de l’équipe de football américain de la ville. Le Chapman hésita un moment, avant d’aller chercher la Fischer. « T’as un ticket avec le quaterback. », lui lâcha-t-il, avant d’effectuer un signe de tête en direction de la caisse. Si elle y allait, et qu’elle acceptait de parler avec ce type, alors il s’était fait des idées et elle n’éprouvait rien d’autre que de l’amitié pour lui. C’était le test idéal, l’occasion parfaite de tirer un trait sur ce baiser et de vraiment passer à autre chose, et c’était ce qu’il voulait, ce qu’ils voulaient tous les deux, c’était évident, pas vrai ? Elle avait qu'à l'embrasser lui aussi, et ses potes avec, puis tous les clients tant qu'à faire aussi... D'ailleurs, pourquoi est-ce que ça l'énervait ? Prenant une profonde inspiration, il ajouta, d'un ton calme et serein. "Il est pas mal, tu devrais y aller... et il a l'air d'avoir vraiment craqué sur toi." Attrapant le gobelet qu'elle tenait dans ses mains pour prendre le relai et la laisser échanger de poste avec lui.     

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@stevie fischer 

( let's get lost in dazzling haze. )
feat @Ariel Chapman

Elle le sentit contre son dos avant de le voir. Son corps se crispa malgré elle, refusant de céder à la tentation de se laisser aller contre lui. Elle serra les dents en essayant de néanmoins afficher un léger sourire. Mais quand elle se retrouva, le visage à quelques centimètres du sien, en sentant presque son souffle se mêler au sien, le rictus amusé sur son visage se fana. Elle s’humecta les lèvres tout en fixant les siennes avec envie. Elle eut un peu le souffle coupé et cela n’avait rien avoir avec le fait qu’Ariel avait été un peu brutal dans sa façon de lui donner les gobelets. Elle n’y prêta même aucune attention tant son cerveau était en alerte rouge. Elle connaissait son visage par cœur et s’était accommodée du fait qu’il avait été irrésistible pour elle, mais ne devait plus l’être. Pourquoi soudainement, elle était à nouveau prise dans une spirale fiévreuse à son contact ? Tel un robot, elle ouvrit le sachet en faisant son job mécaniquement. Ses doigts tremblaient un peu mais elle s’empressa de fermer et d’ouvrir les poings à plusieurs reprises pour faire cesser le phénomène. Peut-être devrait-elle se faire porter malade ? Dire que quelque chose n’allait pas et rentrer chez elle. Une partie d’elle en mourait d’envie, tandis que l’autre lui rappelait son devoir envers Ariel dans l’épreuve du vendredi soir, mais aussi, sa présence qui rendait normalement, tout moment meilleur. Elle ne pouvait pas l’abandonner… et elle n’avait pas vraiment envie de partir. Elle voulait retrouver leur avant, serein et simple. Ce n’était pas en fuyant sa présence que cela allait être possible. Elle allait devoir prendre sur elle.

Le brouhaha des premiers clients aida un peu. Elle n’était plus seule avec lui. Elle retrouva son calme, quand il décida de revenir vers elle. À une distance de sécurité néanmoins. Elle le regarda d’un œil suspicieux, puis jeta un coup d'œil en direction du comptoir. L’un des garçons du groupe était en effet en train de la regarder également, tandis que ses amis plaisantaient autour de lui. Elle se sentit rougir un petit peu, malgré elle. Il était grand, brun, beau… et il le savait. Pas du tout son genre habituel. Mais avec Ariel à quelques centimètres d’elle, elle sut qu’elle n’avait pas le choix. Elle était d’ailleurs un peu étonné qu’il vienne lui passer le message sans mettre un peu plus son grain de sel. Ce n’était pas son genre de la laisser aussi facilement mener sa vie amoureuse. D’habitude, il avait toujours son mot à dire. De plus, l’opportunité et le timing ? C’était un peu trop beau pour être vrai. Mais elle se jeta néanmoins dans la gueule du loup. “Je te l'envoie quand même pour le pop-corn, que tu puisses le juger ?” Demanda-t-elle quand même. Il ne fallait pas qu’elle ait l’air trop empressée. Mais il fallait absolument qu’elle pense à autre chose qu’Ariel. Il fallait que son cerveau se lance dans une croisade contre ses souvenirs. Et tous les moyens seraient bons. Elle plaqua sur son visage le sourire qu’elle réservait aux clients, mi-vraiment-amusé, mi-je-fais-mon-travail. Mais, au lieu du numéro de charme auquel elle s’était attendu de la part du sportif, elle fut agréablement surprise par sa façon charmante de demander son numéro en précisant qu’elle avait tout à fait le droit de refuser. Ses copains s’étaient un peu éloignés pour leur laisser la possibilité de discuter sans être entendu et elle jeta un coup d'œil derrière elle. Ariel était toujours en train de vaquer à des occupations en lien avec le travail et ne faisait pas attention à elle. Ce qui se passait ne semblait pas important pour lui, et n’aurait pas dû l'être pour elle. Ainsi, flattée par l’attention, et désespérément dans le besoin de penser à autre chose que son meilleur ami, elle accepta de donner son numéro au jeune homme. Elle encaissa ensuite le paiement pour son billet et celui de ses amis. “Je finis à 01h00 du matin.” répondit-elle à sa dernière question avant qu’il ne se dirige vers le comptoir des en-cas. Il lui fit un clin d’œil et elle leva les yeux au ciel, néanmoins amusé. “Je t'appelle demain alors !” Elle ne lui adressa qu’un pouce en l’air pour toute réponse avant de se détourner. Elle attendit qu’un nouveau client se présente - ce qui n’arriva évidemment pas - et elle ne pouvait s’empêcher de jeter des petits coups d'œil derrière elle pour voir si Ariel et lui échangeaient quelques mots. Après les derniers événements, elle avait plus que jamais besoin qu’il approuve ce garçon. Bien sûr, il lui trouverait tout un tas de défauts plus tard. En le connaissant mieux. Mais ce soir, qu’il lui dise au moins qu’il n’avait pas l’air trop mal. C’était le seul moyen pour qu’elle soit sûre qu’ils étaient toujours simplement amis et qu’elle n’avait pas tout ruiné. Aussi, quand il fut seul, elle se précipita vers lui. “Alors verdict ? Il a l’air sympa non ?” demande-t-elle, en tentant de l’influencer un peu quand même. Elle attendit sa réponse, un peu fébrile. Pas certaine de ce qu’elle avait réellement envie d’entendre. Mais pour leur bien, il n’y avait pas beaucoup d'options. Les choses devaient redevenir comme avant ce petit écart.